Les quelques toiles qu’il a signées montrent un Khayachi insatisfait devant un bouquet de fleurs, une marine ou un paysage. Ce fatalisme thématique est, en quelque sorte, dépassé une fois Khayachi aborde le nu. Son écriture n’a jamais été aussi nette. Cela coule de source. Il impressionne par la qualité de la mise en page, la position des corps, la saveur des sujets, la pureté de l’écriture, la variété des compositions et l’aisance avec laquelle toutes les émotions sont couchées et accouchées sur le papier ou sur la toile… Là encore, la femme vient au secours pour permettre à Khayachi de se libérer du sujet dominant et de s’offrir un moment de détente à l’ombre bienfaitrice de l’univers féminin.
Variant constamment entre un minimum et un maximum de luminosité, Khayachi a donné sa préférence à l’obscurité pour donner à la lumière davantage de présence.
Aussi belles que soient ses toiles réalisées en extérieur, parcs, jardins, bords de mer, scènes de rue, elles ne constituent en réalité qu’un pâle reflet des capacités réelles de Khayachi à s’approprier le visible… Comme désemparé devant la nature, Khayachi retrouve la plénitude de son style et la pleine possession de son talent dans son atelier en train de recomposer tel ou tel aspect de la vie traditionnelle de Tunisie.
Devant certaines toiles comme «La Corniche», «Gammarth», «Kobbet El Hawa», on voit Khayachi refuser le paysagisme; il l’appréhende, l’imagine comme une répudiation, un renoncement à s’approprier le réel pour ce qu’il est.
Les quelques paysages commis à l’encre de Chine apparaissent comme des œuvres qui n’ont pas eu droit au privilège de la couleur. En revanche certaines toiles cubistes telles que «Le Couple» «La Rachidia» attestent la capacité de Khayachi de s’approprier plusieurs langages.
En réalité, Khayachi avait besoin de l’intérieur, de l’intérieur des maisons traditionnelles comme pour reconstruire une famille dont il a été, en partie privé, par la perte de sa mère.
Cette représentation presque obsessionnelle de la société traditionnelle émerge comme le fruit d’une lutte entre le signe et l’objet, le visible et le lisible, le regardé et le peint…
Khayachi voulait retrouver sur la toile ce qu’il avait perdu, son enfance, ses souvenirs, ses nostalgies, sa Tunisie d’Antan…