A cause de l’austérité des moyens mis en œuvre pour son expression, le dessin est déprécié par la majorité des amateurs des Beaux-Arts qui préfèrent la beauté de la toile à la précarité du papier. Quand on a été éduqué dans le culte de la palette et du pinceau, il est presque inconcevable de renoncer à la toile, pour s’adonner à l’art du dessin qui apparaît, comparativement à la peinture, austère, indigent et infirme. C’est ce drame de la différence entre la peinture et le dessin qui a été vécu intensément par Khayachi.
Ce qui rajoute du malentendu au malentendu, c’est qu’il faut être capable de prendre le crayon sans oublier la palette, car le dessin est l’anatomie de la peinture.
Malgré ce lien de solidarité suprême entre peinture et dessin, le dessinateur reste le frère pauvre, rejeté par le frère riche. Dans cet imbroglio de contradictions, le dessin a pu être réhabilité et retrouver ses lettres de noblesse grâce aux grands peintres. De Michel-Ange à Henry Michaux, de Vlaminck à Dunoyer de Segonzac, le dessin se dégage de l’image pour le moins dépréciée dans laquelle il est classé pour s’affirmer enfin comme une expression à part entière. C’est dire le courage de Khayachi le peintre qui a osé s’affronter aux fausses rumeurs pour pratiquer avec passion et sans complexe l’art du dessin.